Méditation 25ème dimanche ordinaire B – 19 septembre 2021
En chemin…
Être disciple de Jésus, c’est bien plus que d’écouter son message. C’est marcher avec Lui dans une nouveauté de vie (Lettre de S. Paul aux Romains 6, 4). Jésus est toujours en chemin. L’écrivain Christian Bobin appelle, dans un magnifique petit livre, Jésus l’homme qui marche : « Bien peu, écrit-il, arrivent à suivre ses pas. Une poignée d’hommes et quelques femmes » [1]. C’est que, les pas de Jésus prennent une route très déroutante.
Depuis dimanche dernier, nous lisons ce moment de l’évangile selon S. Marc où le chemin de Jésus bascule. Dès le début, le Nazaréen a annoncé que marcher avec lui demandait un complet changement de regard, une conversion profonde. Du Christ, on attend généralement qu’il soit glorieux et puissant comme les grands de ce monde. On lui demande aussi qu’il accomplisse des prodiges et arrange tout selon nos souhaits. Et voilà que le chemin du Christ Jésus sera à l’inverse de celui des grands et des puissants.
C’est chemin faisant que Jésus interroge ceux qui marchent avec lui : Qui suis-je au dire des gens ? C’est en route que Pierre lui déclare de tout son cœur : Tu es le Christ. Et alors, Jésus commence à leur enseigner que son chemin de résurrection va passer par le rejet violent et la mort. Et, un rien plus tard, Jésus répète et insiste car eux ne comprennent pas (c’est l’évangile de ce dimanche).
Eux (et peut-être nous), en chemin, ils discutent pour savoir qui est le plus grand. Cela ressemble à une discussion et même à une dispute de cours de récréation, mais en l’occurrence, la cour des grands, des adultes. Car, c’est le sujet de conversation majeur entre les humains, le sujet sérieux par excellence, spécialement entre adultes. Et même parmi ceux, d’hier et d’aujourd’hui, qui suivent Jésus. Comptes en banques, bagnoles, villas et même couleur des soutanes indiquent qui est le plus grand. Il paraît qu’on devient grand et puissant lorsque l’on convoite et accapare. Le soin mis à se fabriquer une image, quitte à démolir celle des autres, est aussi décisif sur ce chemin-là. S. Jacques nous dit pourtant nettement que ce chemin tue : « Vous êtes pleins de convoitises et vous n’obtenez rien, alors vous tuez ; vous êtes jaloux et vous n’arrivez pas à vos fins, alors vous entrez en conflit et vous faites la guerre ».
Le chemin de Jésus n’est évidemment pas celui-là. Et ce n’est pas non plus le chemin qu’il propose à ses disciples. Au milieu de ceux qui discutent pour savoir qui est le plus grand, Jésus place un enfant et l’embrasse. Placer le plus fragile, le plus petit, au centre et en prendre soin, voilà à ses yeux, la vraie grandeur. Emprunter ce chemin-là conduit vraiment à la vie, à la résurrection. Mais au long de ce chemin, il s’agit de se faire proche de tous les petits et de leur donner la première place.
Chemin faisant, Jésus rejoint l’aveugle et tant d’autres qu’on laisse au bord de la route. Et on ne lui pardonnera pas cette attitude qui est pourtant celle de Dieu, celle du Père. Il sera rejeté par les grands de ce monde et assimilé à ceux qui ne comptent pas. Mais ce chemin-là est le seul qui offre à tous de s’ouvrir à la vraie vie, de ressusciter au-delà de toutes les formes de mort.
Paul Scolas
[1] Ch. BOBIN, L’homme qui marche, Le temps qu’il fait, 1995, p.30.